Billets par Bruno LussatoWednesday, 22 April 2009Le journal du 22 avril 2009CHRONIQUE De la faiblesse
La notion de faiblesse est dès plus subjectives et son évaluation des plus controversées. Dans notre siècle ou seul le Vae Victis est à l'honneur, où les sentiments de compassion et d'empathie sont mués en sentimentallité est l'hommage que l'égoïsme rend à la pitié et à la piété, où le sentiment, la pitié et la pété sont paroles honteuses, où le respect de la parole donnée où l'honneur et la fidélité sont marques de faiblesse, comment différencier la faiblesse telle que nous venons de la décrire, à un manque de caractère, une absence de ténacité, de courage et de promesses non tenues par peur d'être critiqué, d'instabilité et de revirements, qui marquent la faiblesse véritable. Ces faibles vous soutiennent, vous engagent dans une voie périlleuse, courageuse, et quand vous êtes parvenus au milieu du gué, vous laissent tomber. La faiblesse, est une lâcheté travestie en courage tant qu'il n'y a pas de passage à l'acte. C'est en ce sens que je dis toujours à mes clients : méfiez vous de l'amitié des faibles. Mieux vaut traiter avec des adversaires forts. Vous savez au moins à quoi vous en tenir et ils vous renforcent au lieu de vous amollir dans une douce confiance. Et puis, s'ils sont ouverts à la discussion et que vous faites les premiers pas sincères pour conquérir leur estime, il n'est pas rare qu'ils ne se muent pas en amis fidèles. Ce sont déjà des situations que j'ai maintes fois vécu et qui étonnent tous mes familiers.
Une question se pose alors. Est-il possible que dans certaines circonstance un faible devienne fort, et un fort montre des signes de faiblesse? Relisez Stefan Zweig ou interrogez la chronique. Louis XIV était le prototype de l'homme fort,mais à la fin de sa vie il céda à l'influence de Mme de Maintenon dont il devint le jouet. En revanche Louis XVI, exemple peu glorieux de velléitaire soumis à toutes les influences, et dépourvu du moindre caractère, fit preuve face à la mort d'une dignité et d'une force d'ame peu communes. Alors? Cela montre qu'en suivant l'exemple de Korzybski, nous devons proscrire le verbe et le remplacer par AVOIR On se gardera d'affirmer qu'un personnage EST faible et dire qu'à tel instant, à tel moment, il a fait montre de faiblesse. De même le plomb n'est pas lourd et la plume légère, comme Galilée l'a démontrer en les laissant tomber de la tour penchée de Pise. Il s'agit là du combat entre les modes de pensées aristotélicien et galiléen. On remarque la faiblesse d'un personnage par contraste par rapport aux hommes forts qui l'environnent. Mais il est des exceptions, et la force de son entourage peut déteindre sur lui et lui conférér un semblant d'existence, comme la lumière du clair de lune qui ne fait que réfléchir celle du soleil. Picasso avait remarqué qu'un objet médiocre mis dans une vitrine parmi des chefs d'oeuvre, semble en quelques sorte enobli, alors qu'un bel objet, placé dans un grenier plein de vieilleries semble plus mauvais. C'est un phénomène que connaissent bien les antiquaires lors qu'ils installent leur vitrine.
Force et faiblesse des objets d'art Pour le connaisseur la notion de beauté n'a pas grand sens. En Chne, ce qui fait la valeur d'un paysage, est son aptitudeà refléter l'harmonie du monde et l'énergie du peintre-calligraphe. Pour le connaisseur contemporain, ce qui compte est "la force" de l'oeuvre, c'est à dire son aptitude à s'imposer à toutes les autres, à les "faire tomber" en quelque sorte.
Claude Médiavilla en tant que calligraphe particulièrement sensible aux notions de force, d'authenticité et de justesse, n'eut pas détat d'ames pour dénoncer la faiblesse du tracé de Kandinsky par rapport à Lascaux.
De même Claude Mediavilla tient en grande estime un peintre chonois contemporain peu connu, dont notre musée de l'écriture expose depuis des années de magnifiques calligraphies et peintures.
Ci-dessus. Tad Chen 2001, calligraphie du caractère xing qui signifie "forme", style xing-cao, pigment rouge sur papier 34 X 45 cm. In Abécédaire de la calligraphie chinoise, Claude Mediavilla,Flammarion 2002.
L'enseignement des Tarica J'avais étant jeune, comme initiateurs André Naggar et les Nahon qui me firent acheter dans une vente aux enchères au Palais Galliéra, un Hartung de 1950, que j'ai toujours devant moi auprès de mon ordinateur. Il coûta je crois 10 000 francs, un an d'économies. Mon père faillit s'évanouir, mais il finit par assimiler ce tableau et ne voulut pas que je m'en sépare. L'année précédente je l'avais investie dans un Steinway demi-queue de New-York, toujours en ma possession. Je découvris par la suite Tàpies et Poliakoff. Je révais depuis longtemps à de grands tableaux, format 120 figure ou paysage. Ainsi je pus grâce à Naggar acheter un Tàpies de 1950, une merveille aussi complexe que mystérieux e t un très beau Poliakoff de l'époque Troubezkoï.La plupart des Poliakoff étaient ratés ou ennuyeux, tous rouges , et un certain Zerbib les payait en alignant des tas aussi épais que possible de petites coupures. Je crois que Poliakoff jouait aux chevaux. J'adorais le mien mais Marina le trouvait déséquilibré.
Ci-dessus, mon Poliakoffdans mon bureau au BHV. A droite une maquette de l'entrepôt d'Ivry, statue de Rutzch, familier de Dalì qui finit mal.
Une interprétation sur papier d'Auvergne, de mon tàpies.
J'achetai par la suite d'autres tableaux dont un grand Soto qui avait vaincu le premier prix à la biennale de Venise. Et voici que je rencontrai Samy Tarica. Il vint voir mes tableaux et haussa les épaules. Du second ordre, me dit-il. Basardez-moi tout cela et achetez des oeuvres valables. Pour lui, c'était Fautrier, Duchamp, Schwitters et autres Klee. Alain, son fils, ajouta Kosuth. Je finis par me laisser convaincre et achetai chez lui un minuscule collage : le N°9 et, chez le concessionnaire, la Malborough, trois Schwitters dont le meilleur datait de 1918 et le plus spectaculaire de 1925. Il faut y ajouter un Klee de 1914, un chef d'oeuvre minuscule sur gaze. que je dus à sa générosité.
Ci-dessous le Klee, mon tableau préféré. Je ne me suis pas encore remis de sa perte. Il tuait tout ce qu'il entourait. En dépit de ses dimensions exiguës, onne voyait que lui. Disparus Tàpies et Poliakoff ! Le vieux Samy avait raison !
Ci dessous mon Schwitters préféré, d'une complexité et d'une rigueur structurelle ahurissante étant donné son petit format (20,4 X 17,4 cm. Non signé ni daté, oeuvre N°1918/19 - ST. Proveannce Ernst Schwitters. Il était accroché dans la grande maison et avait été transférée sans cesse pour accompaner l'artiste et son fils. Néanmoins de mauvaises langues murmuraient qu'il s'agissait d'un faux. Plus tard je devins un véritable expert en la matière et l'on fit souvent appel à moi pour détecter les faux. Je n'avais aucune hésitation, et je démasquai pas mal de faussaires. Mon rève était de rassembler leplusgrand nombre d'oeuvres majeures, reproduites dans le Schmalenbach, qui faisait autorité. Je fis de nombreux outils pédagogiques voués à l'artiste et amassai une importante bibliothèques de références. Bien. Je dois avouer que le Klee le surclassait, mais celui-ci, le tableau à la bougie de 1925 très connu, et l'extraordinaire et minuscule N°9 qui provenait je crois de chez Tarica, écrasaient les Tapàpies, les Hartung, les Poliakoff. Mon apprentissage avec Naggar était terminé. Avec les Tarica j'étais passé à la vitesse supérieure. La notion de beauté (sous-entendu hédonique et jouissive) était remplacée par les nobles concepts d'innovation, d'avant-garde,, de force et d'énergie, assez proches des valeurs chinoises des lettrés. Tuesday, 21 April 2009Le journal du 21 avril 2009CHRONIQUE La plume et la pensée
On pense trop souvent que la pensée est chose abstraite qui se fixe certes dans l'écrit, mais qui est indifférente à la forme de ce dernier. Quelle importance que ce soit une demi-onciale du IXème siècle, comme celle du Livre de Kells, La Divine Comédie dans le premier folio illustré d'après Botticelli, ou en livre de poche?
LE JARDIN ALBERT KAHN Je me permets une digression pour vous présenter ces jardins et en particulier la section dédiée au Japon. J'y suis allé un moment ce matin, car le temps était radieux et cette description par les images, aurait mieux trouvé sa place dans le billet dédié au printemps. Vous pouvez vous procurer le catalogue, un peu confus et dont les images ne vaudraient pas les votres sur un seul coolpix de Nikon.
Pour voir mes photos, reportez-vous au corps du billet.
Le tout début de l'écriture Vous trouverez une explication très claire et remarquablement complète dans le livre magistral de Claude Mediavilla Calligraphie parue en 1993 à l'Imprimerie Nationale. L'exploit constitué par les 332 pages grand format de ce volume abondamment illustré par des reproductions, des planches, des synoptiques, n'est pas près d'être recommencé. On ne saurait assez recommander l'achat de ce livre exceptionnel. J'essayerai de synthétiser les principales étapes de la découverte de l'écriture sans remonter au déluge,c'est à dire aux grottes de Lascaux! Tout le monde sait que l'origine des signes scripturaux a pour fondement la nécessité de comptabiliser les biens.C'est à Sumer et à Uruk au niveau dit Warka IV , 3500 Ans avant Jésus-Christ qu'apparaissent les premières tablettes sémi-pictographiques. La transition se fait graduellement vers les célèbres tablettes cunéiformes. J'en avais une dans le cadre de ma collection du Musée du Stylo et de l'écriture, et elle disparut au cours du hold-up sanglant de 2001, avec l'essentiel des pièces les plus rares. Mais le rôle ne se limita pas par la suite à favoriser les inventaires et les échanges commerciaux. Entre 2000 et 1000 BC, l'extension considérable de cette écriture la rendit propre aux échanges diplomatiques dans tout le Proche-Orient. En Egypte, trois mille ans avant notre ère, l'Egypte disposait déjà d'un système phonétique et symbolique complet et elle comprenait trois types d'écriture dont une, dite démotique était tracée sur papyrus et devint adoptée par l'administration mais aussi la littérature. Malheureusement la civilisation des pharaons ne se soucia guère de précision et en resta au stade de l'évocation et de l'hiératique. Elle en mourut.
La Crête offre un exemple d'une civilisation extrêmement aboutie, dotée d'une écriture très différenciée, témoin ce disque d'argile trouvé à Phaestos, daté de 1700 BC et non pas taillé mais moulé à partir d'une matrice. Malheureusement cette écriture nous est encore totalement impénétrable en dépis de toutes les recherches et demeure une des plus irritantes énigmes de l'histoire de l'écriture. L'alphabet phénicien à partir de 1200 BC est à la base de toutes les écritures occidentales modernes. Il est encore écrit de droite à gauche et ne comporte que des consonnes ce qui est encore le cas de l'hébreu et de l'arabe contemporain. Il donna naissance à l'alphabet grec, matrice de toutes les langues occidentales, du latin au cyrillique. Les lettres grecques appelées par Hérodote lettres phéniciennes, est le plus riche de toutes l'Antiquité et a été le premier à noter les voyelles. Mais son orientation est toujours de droite à gauche.Les grecs ont abandonné les consonnes gutturales sémitiques et ont utilisé les signes des gutturales sémitiques en sognes destinés à figurer des voyelles dont on ne pouvait se passer. En 338 BC, on distingue trois types d'écriture : celle des livres et manuscrits, celle de chancellerie, et celle des documents privés. On notera que les premières monnaies existaient déjà depuis plus de deux siècles et de ce fait constituent des documents irremplaçables. C'est à l'alphabet latin que l'on doit les premières réalisations vraiment esthétiques. On distingue l'écriture actuaire relativement négligée et utilisée pour les actes juiridiques et comptables, et la magnifique écriture monumentale dont les caractères sont encore les notres. Mais ce n'est qu'à partir du IVème siècle que l'orientation vers la droite l'emporte définitivement. Par ailleurs la capitale romaine présente de nombreuses variantes et ne s'est pas créée d'un coup. Ce n'est sans doute qu'au IIème siècle qu'elle se stabilise. Elle donnera naissance à toutes les écritures ultérieures. Il est également de noter l'abandon du pinceau, pour des instruments comme un simple bout de craie carré ou un calame biseauté. Dernière particularité d'une extrême importance : l'écriture même la plus élaborée était exécutée à main levée sans recours au compas et à la règle. Le maître la possédait en lui et l'exprimait avec une spontanéité créativité remarquables. On est loin des théorisations de Tory et autres humanistes qui recherchèrent des règles de construction rationnelles, n'aboutissant qu'à une sorte de perfection froide, mécanique et ennuyeuse.
Les ancêtres chinois Comme Claude Mediavilla, expert en la matière, l'explique dans son ouvrage l'abcdaire de la calligraphie chinoise (Flammarion 2002) l'écriture chinoise daterait de la dynastie Chou (soit 800 BC).Mais ce n'est qu'en 221 BC qu'elle devint unifiée, telle qu'on la connaît.
Une caractéristique de cette écriture, est qu'elle ne se contente pas d'être compréhensible et de refléter le signifié,mais elle devait être belle.Certes, l'écriture occidentale peut revêtir des aspects d'une grande beauté, mais il restent stéréotypés, si l'on excepte la cursive courante, plus intéressante pour le graphologue que pour l'amateur d'art.C'est ce qui explique qu'en Occident, l'écriture ne parvint jamais à la distinction d'art majeur, comme en Chine, où elle était prisée à égalité avec la peinture, qu'elle complétait souvent. Ces remarques expliquent aussi la dissociation opérée par les "intellectuels" et les muséologues, qui dans bien des cas ne voyaient pas de différence entre un texte bien ou mal calligraphié, ou diffusé en livre de poche, voire téléchargé dans l'internet ! On se reportera avec fruit, à l'avis Une caractéristique de l’écriture chinoise est qu’en principe elle est formée de blocs tenant dans un carré, et disjoints. Mais on peut également relier ces blocs entre eux pour former un ductus fluide et imaginatif, ressemblant à une cursive spontanée, l’esthétique en plus. Cette variété inépuisable de formes, hautement individualisée permet de distinguer les grands maîtres des honnêtes calligraphes. Rien de tel dans la calligraphie occidentale d’une grande uniformité au sein d’un modèle donné : caroline ou fraktur. Certes les calligraphes contemporains essayent de s’évader de ce carcan mais ils tombent alors dans l’art pour l’art alors que dans la calligraphie chinoise, les deux sont indissolublement liés.
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Commencez ! Ainsi le printemps appelait dans la forêt. Comme l'écho des vagues résonne comme de vagues lointaines, un autre chant s'approche, et s'approche plus prés; le bois résonne d'un concert de douces voix; maintenant fort et clair il s'approche déjà de plus en plus puissant! Comme des son de cloches la jubilation retentit ! La forêt, qui bientôt répond à l'appel, elle retrouve une vie nouvelle, et entonne le doux chant du Printemps !
Dans une haie de ronces, consumé par l'envie et l'envie, armé de sa fureur, l'hiver plein de rage, caché parmi les bruissements de feuilles mortes, épie et écoute se demandant, comment causer du tort à ces chants joyeux.
Ces vers proviennent du premier acte des Maîtres Chanteurs de Richard Wagner. Il nous rappelle que les médisances, les aigreurs, la mauvaise foi, la calomnie, la jalousie, sont toujours tapies dans l'ombre continuant leur travail de sape.
A ce propos, après la petite-fille, la fille, Fabienne Gaston-Dreyfus. Je reconnais que " la passion de son père, partagée avec sa femme, était sa collection de peinture, constituée avec l'aide d'Alain Tarica dont il était devenu un ami précieux." Je n'ai garde de l'oublier, ainsi que sa décision courageuse d'échanger sa collection d'impressionnistes (si je ne me trompe) contre d'authentiques chefs d'oeuvre d'Art Moderne. Je me souviens notamment de son merveilleux Hommage à Picasso, un des Paul Klee les plus précieux. J'ai partagé son amitié avec Alain Tarica, qui m'a avec son père Samy, fait découvrir Kurt Schwitters dont j'ai pu acquérir des oeuvres majeures, comme Merzbild Rossfett de 1918, et Merzbild mit Kerze, (assemblage à la bougie) qui ont figuré dans mont centre d'Art contemporain au Musée de Genève et que j'ai analysé in extenso dans une plaquette qui a rencontré un notable succès. Cela me donne l'idée de consacrer un billet à cet immense artiste, encore méconnu. Les Tarica ont changé toute ma vision de l'Art, ainsi qu'à Alain. Ils font partie de ces immenses marchands qui font les grandes collections (y compris celle de Bergé-Saint Laurent). Ils ne se contentaient pas de nous procurer des moutons à cinq pattes, ils étaient également de grands pédagogues et des initiateurs désinteressés.
Je ne puis donc que comprendre l'indignation de la famille d'Alain Gaston-Dreyfus, et je lui ai déjà exprimé mes plus plates excuses, qu'elle n'a pas dû lire sans doute. Quant à la malveillance, c'était plutôt de l'aigreur et je m'en suis expliqué. J'ai été mortellement déçu de voir s'échapper le fond Kandinsky et j'ai mis bien du temps pour digérer cette déception. Elle fait écho à une autre occasion, d'une tout autre envergure, que mon père avait dédaigné. Il ne s'agissait de rien moins que de la vente de la succession Klee, qui était alors à vendre. Mais nous venions à peine de sortir de la guerre et Klee ne suscitait pas parmi les riches mécènes l'envie de consentir un effort financier considérable pour l'époque. Mon père avait largement les moyens de l'acheter. Il préféra investir dans les vignobles de Tunisie dont il contrôlait une grande partie. Il a tout perdu depuis avec la nationalisation des biens français. Je fis des pieds et des mains pour le décider. J'en étais malade. Mais mon père me considérait avec agacement, comme un rêveur utopiste, et détestait la peinture moderne qu'il prenait comme tant d'autres, pour de la fumisterie. Mais ce n'était pas le cas d'Alain Gaston-Dreyfus qui connaissait bien la valeur artistique du fonds.
Sur le chapitre des rigueurs de l'hiver, j'évoquerait la grotesque affaire des excuses de Madame Royal, au Président Zapatero, cette fois. J'enparlerait car c'est un excellent exemple de désinformation qui illustre les ambiguïtés de la sémantique.
Venons-en aux faits de première main tels qu'ils ont été rapportés par des parlementaires de gauche et de droite, et unanimes quent à leur version des faits. Gillez Carrez, rapporteur des Finances de l'Assemblé Nationale a témoigné des propos élogieux tenus par Nicolas Sarkozy au sujet de Jose Luis Zapatero; "Il gère au mieux son pays et a su se faire réélire alors que d'autres se prétendant très intelligents ont été incapables d'une telle performance. De même Nicolas Sarkozy, se gaussant de la gauche a dit ironiquement : il n'est peut-être par très intelligent alors que d'autres se prétendant très intelligents ont été des incapables de sa performance".
D'où vient la source de la désinformation? D'un journaliste de Libération qui prétendait qu'au cours du déjeuner (auquel il n'assistait pas, bien entendu) et qui disait que Nicolas Sarkozy avait déclaré que Zapatero n'était peut-être pas très intelligent, ce qui est la pure vérité. Mais il passa sous silence le contexte ironique et l'ensemble de la phrase, d'où un mot avait été isolé de son contexte, procédé éprouvé d'intoxication.
Et Mme Royal dans tout cela? Je dois, en tant que professeur de management, lui tirer mon chapeau. Elle agit en parfait agent de marketing, sans scrupules d'état d'âme, visant l'efficacité et récompensée par son extraordinaire succès. Elle utilisa un procédé, qu'elle inventa avec une créativité et qu'elle mit en pratique avec un art consommé : présenter les excuses de la France, aujourd'hui à Zapatero, demain à Merkel, à Barroso ou à Obema.
En définitive je n'ai pu me rendre au Pré Catelan pour des raisons indépendantes de ma volonté. Il me reste a espérer que demain il fera aussi beau et que je pourrai me rendre au jardins Kahn. Ils mériteraient un billet à eux tous seuls.
A propos des attaques de l'hiver, je signale à mes amis que je serai à nouveau indisponible à partir du 11 mai et pour une dizaine de jours. Je demande à notre ami S*** de prendre le relais. Vous y gagnerez au change en hauteur et vous y perdrez peut-être en polyvalence.
Musique de printemps
Il n'y a pas que la poésie pour illustrer la plus belle saison de l'année. La musique est peut-être encor plus suggestive ainsi que la peinture (pensons à Botticcelli !) Ci-dessus, une version trafiquée pour des raisons de copyright, et extraite du codex éléphant de L'Entretien. Elle montre cependant le rythme dansant que l'on retrouve chez Beethoven et chez Schumann.
L'oeuvre qui se rapproche le plus de Botticelli, est la Symphonie N°1 "Le Printemps", op.38 de Schumann, etnotamment le dernier mouvement : Allegro animato e grazioso. Je vous conseille l'excellente version de Rafael Kubelik, DG.432 305-2
Très proche de cette musique à s'y confondre presque, le dernier quatuor Op.135 de Beethoven, et plus exactement l'allegro final, dansant et aérien. Cette oeuvre ultime datant de 1826, un an avant la mort du compositeur, laisse déjà par sa rupture radicale avec ce qui précède, la Xème Symphonie dont nous nous sommes déjà entretenus. Le version du Quatuor Alban Berg a le grand mérite d'être interprétée live selon la stratégie du quatuor, qui privilégie la spontanéité et la vie à la perfection textuelle.
Au sujet du Quatuor Op.135 de Beethoven, voir le corps du billet.
Nous pouvons également citer le livre et le film de Jerzy Kosinski, Being There qui est un véritable hymne au printemps. Chance, le jardinier explique qu'après l'hiver, à condition que les racines soient saines, le printemps refleurira, métaphore qui est également celle de la toute fin du Chant de la Terre de Gustav Mahler :
La terre aimée partout se couvre de fleurs au printemps et verdoie à nouveau ! Partout éternellement bleuit la lumière du lointain !
Ce qui pour Chance le jardinier n'est que constatation prosaïque est interprétée par le Président des Etats Unis comme un rafraîchissante métaphore, expliquant qu'à condition d'avoir un bon jardinier (lui ! ) après la récession et les difficultés économiques viendront les beaux jours amennés par le printemps. Ce qui se passe dans la nature, nous devons l'admettre pour l'économie.
Ce film est doublement un film d'art: celui de Kosinski le scénariste, celui de Kosinski, le metteur en scène. On peut se le procurer en Blue Ray. Un jour Kosinski reçut un télégramme de Chance le jardinier assorti d'un numéro de téléphone. L'auteur fit le numéro et ce fut Peter Sellers qui répondit ! On connaît le résultat.
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Posté par Bruno Lussato
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Sunday, 19 April 2009Le journal du 19 avril 2009CHRONIQUE Expositions Hier et aujourd'hui, j'ai écrémé les expositions les plus prestigieuses, Calder excepté à Beaubourg. Des surprises m'attendaient, qui me donnent l'impression qu'on marche sur la tëte.
J'ai déjà constaté que l'exposition Blake, était à moitié vide alors que celle sur les tags attirait une foule de visiteurs. Au Musée Cernuschi on verra des peintures chinoises rénovées, mais celles qui ont été une révélation, proviennent de contemporains d'une extrême force et d'une hardiesse sans pareille. Ils coûtent d'ailleurs des sommes prohibitives. Pas la moindre curiosité du public. Un bas-bleu qui se donnait de grands airs d'experte, nous conseilla de voir le pendant japonais à ces peintures, à la Bibliothèque Nationale. Nous ne pumes y pénétrer ma soeur et moi à cause de l'immense queue, une véritable foule. L'intitulé de l'exposition était la collection Rivière, de l'impressionisme au japonisme. Nous fumes un peu déçus car nous espérions voir, comme au Musée Cernuschi uniquement des peintures et des paravents japonais. On se serait passés de revoir des impressionnistes. Aujourd'hui nous forçames le barrage grâce à ma condition d'handicapé. Et qu'avons nous trouvé? Rivière n'était pas le mécène qui avait collecté des oeuvres japonaises, mais un peintre autodidacte inconnu épigone des estampes japonaises. Les quelques estampes de Hiroshige et de Hokusai faisaient cruellement ressentir l'amateurisme et le kitsch des oeuvres du dit Rivière. Et les gens faisaient des queues interminables pour voir cela ! Nous allames alors voir au Luxembourg la magnifique exposition des Filippo et Filippino Lippi son fils, où l'on pouvait découvrir des Donatello sublimes, des Boticelli et de gigantesques Filippo Lippi. L'expo était à moitié vide, pas la moindre queue aux caisses, le désert! Pourtant les Lippi avaient bénéficié d'un important affichage contrairement à Rivière. Que s'est-il passé? Les gens sont-ils tombés sur la tête? Je ne trouve aucune explication rationnelle à un comportement aussi paradoxal. Peut-être aurez-vous une réponse. En attendant précipitez-vous à l'Exposition du Luxembourg, sans oublier celle du Cernuschi. Absence de queue garantie ! Friday, 17 April 2009Le journal du 17 avril 2009CHRONIQUE L'art et la crise
L'objet de ce billet est, à la lumière des évènements récents de se demander si les oeuvres d'Art, les pièces exceptionnelles, constituent une valeur refuge. L'emballement récent (Vente du siècle, bond en avant de la numismatique, récentes ventes, pénurie de tableaux importants comme des Tàpies, aujourd'hui introuvables, en dépit d'une demande soutenue, paraissent donner une réponse encourageante. Mais il faut se méfier des emballements et l'arbre cache la Forêt. On oublie un peu vide que nous sommes au début et non pas à la fin du typhon et on ne sait comment se comportera le marché en cas de désastre majeur. Par ailleurs les spécialistes ne font pas faute de nous rappeler que le marché de l'Art ne saurait être tributaire de la spéculation. Il faut attendre vingt ans avant d'espérer retrouver sa mise et de faire des bénéfices. En revanche, et c'est tout différent, l'investissement sera préservé durablement et une fois la crise passée, conservera sa valeur. C'est un patrimoine qu'on pourra se passer d'une génération à l'autre. Enfin, les grands collectionneurs finissent par être plus compétents que bien des experts professionnels et bien entendu, des prétendus muséologues auquel Socrate a fait appel pour couler la Deuxième Fondation. Il est bon de rappeler que ma collection de stylos et instruments d'écriture, la première au monde a été édifiée en moins que quatre ans!
Lettre d'insultes Elle provient de la petite-fille de Monsieur Gaston Dreyfus que je cite dans le billet du 12 Juillet sur la vente du siècle. J'opposais le sérieux et la passion de Pierre Bergé et Yves Saint Laurent à la désinvolture de M.Gaston-Dreyfus qui ne daigna pas interrompre ses vacances pour une acquisition dépassant tout ce qu'on peut imaginer : le fond de Mme Kandinsky mis en vente. Elle donne pour preuve de mon aigreur et de l'infiabilité des informations contenues sur le blog, mon écorchement du nom de M.Gaston Dreyfus que je nomme Gaston-Alain Dreyfus au lieu d'Alain Gaston-Dreyfus. Et elle m'accuse de le traiter d'amateur superficiel.
Si elle connaissait un peu mieux le blog, elle saurait que je cite de mémoire, sans me référer à aucune note, et que j'ai averti mes internautes que cette mémoire, non étayée par des documents, me fait souvent défaut... Mais pour de petits détails de cette espèce. Pour le fait que j'ai interverti Alain Gaston-Drefus, en Gaston Alain--Dreyfus, il ne s'agit même pas d'un trou de mémoire, mais d'une stupide erreur de frappe. Je sais très bien que le collectionneur dont je parle se nomme Gaston-Dreyfus pour l'avoir beaucoup fréquenté et sympathisé avec lui et pour avoir décidé Nina Kandinsky à lui vendre le fonds de préférence à d'autres acheteurs. Mission d'ailleurs réussie mais qu'on fit piteusement échouer. Quant à le traiter d'amateur superficiel, ceci n'est qu'une simple opinion, et j'avoue qu'elle est injuste. M.Gaston-Dreyfus était sérieux : il avait parfaitement assimilé les seçons de Samy et d'Alain Tarica et c'était un homme d'une extrême élégance et d'une grande courtoisie, ce que l'on nomme populairement "la classe". Je comprends donc l'indignation de sa petite-fille et je lui présente mes excuses. Elle ne faisait que son devoir.
Mais il reste que les évènements, vieux de plusieurs décénnies, alors que la petite-fille dont je n'ose donner le nom de peur de l'estropier, n'était sans doute pas née, que j'ai relatés, sont l'expression d'une vérité sans concession. Le fonds fut vendu à Bayeler et ma déception fut immense, expliquant sinon justifiant mon "aigreur". Je m'étais donné tant de mal pour convaincre Nina Kandinsky, qui avait toute confiance en moi! La petite fille de l'amateur éclairé que fut M.Gaston-Dreyfus ne pouvait évidemment les connaître. Elle n'y était pas et elle se garde bien d'ailleurs de les infirmer. Je suis sûr que j'ai ainsi heurté des sensibilités d'amis ou de parents de personnalités que j'ai critiqué : le cas de M.Guy Sacre en est un exemple. Les arguments invoqués à mon encontre, si on excepte les insultes, sont valables : on me reproche mes fautes de frappe !
Mes relations avec Aimé Maeght Je connus Nina Kandinsky chez Maeght qui la représentait officiellement. Je rencontrai Maeght chez le concessionnaire Peugeot qui était de ses bons clients et qui me recommanda chaleureusement. Le conact et la sympathie furent immédiats. Un coup de foudre. Maeght me dit que je jour, il le marquerait d'une pierre blanche. Je connus ainsi toute l'équipe : Daniel Lelong qui venait de la finance et devenu le commercial de l'équipe, Dupin, le poète qui rédigeait la revue de Maeght : Derrière le miroir , Marguerite sa femme dite Guiguitte, qui protégeait son fils Adrien un faible que n'appréciait guère son père, ce qui faisait des disputes familiales sans fin, Claudine la fidèle comptable au fait de tous ses secrets. Je fus invité souvent à la fondation et autour de la table, il y avait un riche amateur suisse, Mirò, Nina Kandinsky, et toute la tribu. Un jour à l'occasion d'une cérémonie d'anniversaire, une merveilleuse soirée réunit Hartung, Zao Wou Ki, Miro, Chagall, Giacometti, Tapiès (si je ne me trompe), Nina Kandinsky, une habituée, et bien d'autres. Je les fréquentais tous par l'intermédiaire de Maeght et ils me firent tous des encres pour mon musée de la calligraphie.
Nina Kandinsky avait toute confiance en moi. Elle adorait les bijoux de Van Cleef et Arpels et avait un joli chalet à Gstaad. Par ailleurs elle était terriblement avare et admirait la richesse. Elle habitait à Neuilly dans les immeubles donnant sur le bois et où résidait Jean-René Fourtou, le PDG de Rhône Poulenc. On l'accusa d'avoir exercé une influence néfaste sur son mari dont laaa période parisienne fut trop jolie, trop décorative. Par la suite, on trouva Nina étranglée dans son chalet, dépouillée de tous ses bijoux. Le mystère n'est toujours pas résolu.
Elle me confia qu'elle voulait vendre tout son fonds, inestimable et comportant des pièces introuvables. J'insistai pour qu'elle donnât la priorité à Alain Gaston-Dreyfus, qui avait une belle Mercédès à air conditionné, et une propriété avec des chevaux dans les environs de Rambouillet. Est-il riche?, me demanda-t-elle sur un ton dubitatif. Très riche lui répondis-je, enjoignant Alain à multiplier les signes extérieurs de richesse. Samy Tarica était dans le coup et espérait que Alain enlèverait le morceau. Enfin, on se mit d'accord sur la somme de un milliard d'anciens francs. Mais Gaston Dreyfus se faisait tirer l'oreille pour signer un contrat "La vieille, me dit-il, il faut la faire mariner. Un milliard, ça ne se trouve pas sous les sabots d'un cheval" Mais au mois d'Août, alors qu'Alain et sa famille étaient sur leur yacht dans les eaux turques, Nina m'annonça qu'un cheval s'était présenté et que sous ses sabots il y avait un milliard de francs! On télégraphia ou on téléphona à Gaston-Dreyfus, qui dit que c'était une manoeuvre pour faire monter les prix et un bobard. Cela pouvait attendre au retour des vacances. J'eus bon insister, il était inflexible. Mais revenu de Turquie, il eut une mauvaise surprise. Beyeler, le plus grand marchand de tableaux d'Europe, plus même que Berggruen et que Maeght, l'avait coiffé au poteau. J'en crevai de rage et cela explique sans doute le ressentiment que je lui portai. Tarica dans cette occasion agit avec moi avec la plus grande générosité, celle d'un grand Seigneur qu'il était ainsi que son fils Alain et je lui en suis encore reconnaissant. Il prit les choses comme il le fallait : de haut.
Les méthodes commerciales de l'équipe Maeght.
Lorsque se présentait un gros poisson, il était accueilli Par Guiguitte, par Lelong et par Maeght lui-même. On le faisait entrer dans un pièces noire, dans lequel une tableau se trouvait sur un chevalet. C'était souvent un Mirò qui, cela nous semble stupéfiant aujourd'hui, avait besoin d'un homme comme Maeght, son supporter fervent, pour se vendre. Il était complètement délaissé.
On laissait mariner pendant quelques bonnes minutes le client, puis entrait Guiguitte, et s'asseyait sans mot dire. Elle émettait des sons indéterminés, qu'on finit par décoder : alors, hein, qu'estce que vou en dites, hein? E taussi curieux que cela puisse paraître, ce langage informel avait un impact supérieur à toute argumentation. Lelong, lui, se chargeait de celle-ci et vantait les mérites du tableau. Enfin Maeght intervenait sur le mode autoritaire et mécontent. Alors, on vous présente le meilleur investissement et vous hésitez. Rappelez-vous : vous ne m'avez pas suivi pour Giacometti, pour Chagall, pour Braque, et voyez ce qu'ils coûtent aujourd'hui ! Vous recommencez la même chose avec un génie non encore à sa valeur comme Miro. Et vous le regretterez. Dans quelques années, il sera aussi connu que les autres, et vaudra aussi cher.
Le plus beau, c'est que Maeght avait parfaitement raison et que bien de richez amateurs se détournent de grands peintres confirmés comme Tapiès, Hartung, Mathieu, et autres Fautrier. Dubuffet arrive à émerger encore.
Et j'en viens à ce qui est le sujet de ce billet. En cas de crise grave imminente, avec une rupture possible du cycle monétaire, coment investir de façon à ce qu'à la sortie de ma catastrophe, vouv vous trouviez avec des biens ayant conservé leur valeur?
Voir la suite dans le corps du blog. Continuer à lire "Le journal du 17 avril 2009" Thursday, 16 April 2009Décodage - nouvelle éditionUn ami de très bon conseil trouve qu’il serait dommage de décoder de façon univoque mes paraboles. Il a bien raison. Même si mon objectif est bien de susciter une réflexion autour de l’éthique des collectivités, mes énigmes doivent être lues différemment selon qu'on adopte « le point de vue du fils et du père, de quelqu'un qui s'occupe de son champ ou de quelqu'un qui n'a jamais rien planté, etc… ». Aussi conformément à son avis, je vais tenter de vous offrir plusieurs décodages, quitte à paraître contradictoire… Cela ne me pose pas de difficulté car il me semble que nous ne souffrons pas de l’absence d’une « bonne pensée ». C’est le manque de pensée tout court à l’échelle des collectivités qui nous préoccupe. Je préciserai que le domaine de la pensée politique contemporaine dépasse à peine la gestion du quotidien, l’horizon est à quelques années alors que l’unité temporelle de la pensée des collectivités, tout comme en géopolitique est la décennie. Quant à notre élaboration, elle se distingue justement de la géopolitique en ce que cette dernière tente d’expliquer et de comprendre alors que de notre coté nous essayons d’introduire des valeurs, des codes et des cadres pour l’interaction apaisée des ensembles identitaires. Notre dernière contribution était la suivante : « Jadis, un malheureux paysan priait pour trouver le réconfort. Il fut entendu et trouva chaque jour dans son meuble de quoi le contenter. Le paysan fut enchanté par ce miracle qui dura si longtemps qu’il en délaissa son champ. Bien plus tard, le meuble en vint à se tarir et le paysan qui n’avait ni provisionné ni tenu son champ fut affamé. » D’habiles commentaires se demandent pourquoi, le champ fut délaissé. Le paysan ne travaille-t-il pas aussi par amour de son métier ? Ne sait-il pas que sa terre risque de s’abîmer en l’absence de soins ? Nos lecteurs envisagent avec peine cette situation d’abandon et confiant dans le bon sens terrien, ils esquissent une autre fin à l’histoire où le paysan mû par ses valeurs et ses traditions aurait continué son labeur pour en profiter doublement le jour où sa survie devait dépendre à nouveau de son champ. Je suis enchanté par ces réactions car le paysan dont je parle n’est pas un paysan ordinaire, il s’agit d’une somme de paysans, c'est-à-dire d’une société entière. Et ce qui me taraude c’est que le bon sens des uns et des autres disparaît lorsque l’ensemble de ces individus se réunissent et que c’est la collectivité qui agit et décide pour eux. Posons les questions différemment : qui parmi nos lecteurs sait coudre ? tisser ? construire une maison ? traire une vache ? confectionner des meubles ? entretenir un champ ? Vous me répliquerez, pourquoi nous adonner à ces activités si le « miracle » technologique nous permet de déléguer tout cela à des usines, des machines et des spécialistes infiniment plus performants ? Notre petite histoire raconte que justement cela tient du miracle et que ce miracle nous fait perdre substantiellement de vue une partie de l’essentiel. Cet essentiel ne se limite pas à la connaissance d’un savoir paysan. Il s’agit d’une perte de sens. En se concentrant chacun dans une activité spécialisée nous reconstituons une fourmilière, un cybionte pour reprendre un terme cher au Professeur. Dans cet univers, le moteur de l’histoire devient l’inertie et sa direction est exclusivement déterminée par la compétition pour les ressources et les marchands de progrès. Toutes nos découvertes et tout notre savoir accumulé depuis des siècles forment ce miracle qui nous permet de délaisser « notre champ » mais dans ce champ poussaient nos racines, nos fondements initiaux, nos repères, nos identités, nos langues, nos croyances et nos singularités. Certes, propulsés dans l’histoire toutes ces différences produisaient intolérance et défiance. La guerre n’était que la manifestation la plus violente d’un climat permanent d’hostilité et de compétition territoriale. Faut-il pour autant cautionner sans réserve l’utopie technologique, une utopie qui nous promet un monde plus lisse, plus homogène, plus interconnecté, plus tolérant, plus prospère et plus pacifique ? Je ne le crois pas et chaque jour sont publiés d’excellents ouvrages qui démontrent parfaitement l’impasse que représente cet horizon. Cela ne veut pas dire pour autant qu’il faille lui préférer nos anciennes querelles de clocher avec des collectivités incapables de saisir la filiation commune de toutes les sociétés humaines. Pour le dire autrement, à moins d’être aussi peu prévoyant que le paysan de notre histoire, il faudra bien accorder une confiance relative à nos technologies, et doubler ce profit discutable d’un maintien des traditions qui témoignent de notre vitalité et d’une nouvelle philosophie apte à faire dialoguer l’ensemble des civilisations. Lire les commentaires de B.Lussato dans le corps du billet. Je suis obligé de les reprendre à zéro parce qu'inopinément tout a disparu. Continuer à lire "Décodage - nouvelle édition"
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