CHRONIQUE
ZEN?
Cest une question de digestion. Il faut apprendre à évacuer les pensées négatives, pardonner aux affronts d'êtres chers et qui vous accablent de leur indifférence, pire de leur mépris, et qui persistent dans ce comportement en l'aggravant quand vous essayez de les fléchir, se garder de tout sentiment de rancune, de vengeance, de frustration, comprendre et aimer un adversaire digne de ce nom, se moquer des snobs, des baoutcha , en dialecte milanais ces outres creuses, faire le deuil de ses illusions en riant, plus difficile encore, se pardonner pour toutes les fautes passées afin de mieux réparer dans l'avenir, se réfugier dans une sphère lointaine d'où le bruit du monde parvienne assourdi, planer dans un niveau spirituel intemporel, sans lieu ni consistance charnelle, voici à mon sens ce qui s'approche de ce que les adeptes nomment le Zen.
DU BLOG-NOTES
MESSAGE PERSONNEL A BEN
Mon cher Ben, j'avoue de rien comprendre du tout à cet échange de messages et je ne me souviens même pas d'avoir répondu à votre exigence tout à fait légitime. Mais il faut que vous sachiez que je n'ai aucune possibilité d'envoyer des mails, je ne comprends pas pourquoi, et ceux qui m'assistent en informatique non plus, cela me met dans une pénible position. C'est pourquoi ce blog qui est lu par tous mes amis, est bien utile. En tout cas dès que je serai à Paris, j'essayerai de prendre ce problème à bras-le-corps. Par ailleurs le 28 je connaîtrai les résultats de ma chimio passée et j'espère ne pas avoir de mauvaises nouvelles. Vous comprendrez donc qu'en ce moment je puis avoir la tête ailleurs. Avec toute mon amitié et mes excuses.
LA CHRONIQUE DE FOND : ZEN ?
LA LITTERATURE ZEN
Tous veulent pour des raisons diverses, qu’ils trouvent unanimement respectables, atteindre cet état supérieur. C’est comme la recherche du Saint Graal ou de Montsalvat dans le moyen âge catholique. Il n’y a donc rien de surprenant de voir apparaître des quantités de sectes, de séminaires, d’associations, de gourous, de livres et manuels dont la plupart ont pour effet d’élever, à défaut du niveau spirituel des adeptes, le niveau financier de ceux qui le produisent. En ne prenant que les livres, on trouve des dizaines, des centaines, des milliers, des dizaines de milliers, de ces guides qui vous expliquent comment atteindre cet état miraculeux. La plupart énoncent des règles assez précises, certaines banales et triviales, certaines surprenantes et inattendues ; les unes intuitives, les autres acrobatiques. Ces règles s’appuient souvent sur des considérations très matérielles : comment s’alimenter, comment dormir, les sports facilitateurs et ceux déconseillés. Evidemment l’absorption de drogues et de stupéfiants est déconseillées, mais brûler de l’encens ou boire des décoctions de plantes médicinales, n’est pas loin de produire le même effet.
Bien souvent la recherche de l’état de grâce va de pair avec des préoccupations moins sublimes comme prévenir les démangeaisons, soulager le mal de dents, guérir les varices, protéger contre la grippe. Souvent l’usage de la phytothérapie devrait être limité à l’usage externe. A l’usage interne il peut se révéler désastreux pour l’estomac ou le tube digestif, qu’il peut décaper comme l’eau de javel décape un tuyau encrassé.
Des gourous individuels peuvent par la prière ou l’ouverture à l’être suprême qui tombe sur eux comme la colombe sur Jésus Christ, guérir à distance les phlébites et les cancers. Ils dissuadent souvent – ce qui est interdit par la loi – les patients de s’adresser à la médecine officielle qui ne tient pas compte du malade mais seulement de la maladie. Une de mes cousines atteinte d’un cancer du larynx, de peur d’une opération lourde par rayons gamma (elle avait raison) se jeta dans les griffes d’un docteur Solomidès (si je ne me trompe) qui lui administra des piqures d’un remède génial de son invention. Elle mourut à l’hôpital américain. Lorsqu’elle décida de se soigner pour de bon, il était trop tard.
Lorsqu’on m’administra voici un peu moins de deux ans, des doses expérimentales massives d’interféron, je faillis crever. Lorsque Sarkozy me passa mon cordon de commandeur, je ne pus me lever de mon siège, il dut s’incliner contre tout protocole pour me le mettre autour du cou. Je ne pouvais dire un mot sans avoir à portée un verre d’eau. Je dus arrêter quelques mois plus tard sur avis médical le traitement. Mon virus avait reculé mais on ne pouvait décemment, dit le professeur Stanislas Pol qui me suivait, laisser souffrir ainsi un être humain. Moi, j’avais du courage, mais le professeur et tout mon entourage me pressaient d’arrêter l’expérience. J’avais vieilli de dix ans d’un coup. Mais cette dose de cheval me donna deux ans de survie supplémentaires, et c’est tout aussi important. Hé bien, croyez-le, encore aujourd’hui je suis assailli par de bonnes âmes qui tirèrent argument de cet épisode pour m’inciter à abandonner l’hôpital et le traitement en cours, qui pour m’expédier chez tel « spécialiste » à Tel Aviv, qui chez tel phytothérapeute dans la forêt noire. La meilleure proposition venait d’Igor Poliakoff. L’idée, pondue par je ne sais quel médecin soviétique était simple. La fièvre à quarante degrés est quelque chose que la nature a concocté pour tuer tous les virus. Il suffit donc, sous contrôle médical, de chauffer le sang à soixante degrés pendant quelques minutes, ou dizaines de minutes, et vous voilà définitivement guéri tout de suite après. Aucun virus ne peut résister à cette température. Aucun humain aussi, je suppose, puisque Igor ne tenta jamais l‘expérience !
Ces considérations utilitaires nous éloignent du zen, certainement. Revenons-y et quittons les gourous pour étudier les manuels.
MANUELS, GUIDES ET RECETTES DE CUISINE
Ils sont généralement bien structurés, avec une table des matières, un avertissement du style « comment tirer le meilleur profit de votre **** » et un plan détaillant les différents conseils rangés par catégorie bien définie. Chaque catégorie donne des cas, quelquefois en présente à la sagacité du lecteur (testez votre compréhension du point X***) et presque toujours agrémente le tout d’une ou plusieurs citations édifiantes tirées des pensées de Marc-Aurèle, de Luther King, de la Bible, ou de Truman Crapote. Les citations de Jung, de Talleyrand, ou de Montaigne font également bon effet. A la fin du livre on trouve une bibliographie succincte, dont une partie importante est réservée aux ouvrages de l’auteur, l’e-mail de celui-ci ou de son officine qui prodigue des conseils gratuits de 1 minute, payants au delà.
Souvent hélas, appliquer les recettes de cuisine nécessaire pour atteindre la condition physique propice à la révélation de l’Etre Suprême, ou de planer loin de toute contingence malencontreuse, est tellement compliquée qu’elle accapare tout le temps disponible même pour un retraité.
Je pense à ces manuels de management pour kiosque de gare :
Jouez win-win et appliquez la stratégie du dauphin, comment gravir les échelons en peu de temps et séduire votre boss ?
Doublez votre efficacité et votre valeur sur le marché, grâce à CENTAURE ®,
Un MBA de YALE vous apprend à exploiter au maximum votre diplôme,
Les Secrets de la réussite de Bill Gates enfin dévoilée. II est milliardaire, pourquoi pas vous?
Comment paraître cultivé dans les milieux d’affaires sélectifs et être admis dans leur club exclusif, par Morton Citron auteur du best seller : comment jouer le clair de lune de Beethove et stars and stripes dès la première leçon et sans connaître les notes?
La culture en neuf leçons en achetant le logiciel Madonna Lise ® par le célèbre commentateur de la chaîne Garbage in, Garbage out © Tommy Minestra.
Etc… etc… Ad nauseam.
Et je ne citerai pas les livres d’automédication, de cuisine, de bricolage, ou encore les conseils pour investir :
« Comment se constituer un stock de pierres précieuses »
« jouez avec le courant et gagnez avec la Statégie du Dauphin ®
La méthode VINCI © désormais à la portée de tous.
Alors ? Alors, plus je vais, plus j’apprécie les cérémonies du thé. Mais c’est le domaine du Mingei que j’explore ailleurs.