Rückblick
Enfin, Bonnet s'est décidé! Il nous a adressé de New York une description de la rétrospective d'un des vingt cinq peintres que NewWave a sélectionné. J'avais déjà cité une de ces plaisanteries (jokes) de très mauvais gôut censées pour Prince de symboliser la sous-culture américaine:
Le docteur : mon cher ami j'ai à la fois une mauvaise nouvelle et une bonne nouvelle à vous annoncer.
...?
La mauvaise nouvelle : votre mal est incurable et vous n'en avez que pour trois mois à vivre.
... !
La bonne nouvelle : j'ai eu une liaison cette nuit avec ma secrétaire.
La série de ces "jokes" ouvrent au Guggenheim Museum une vaste rétrospective de ce pourfendeur non agressif des stéréotypes de la culture et de la Culture de son pays. Il reproduit en les soumettant à une forte distorsion des images banales et parties de l'imaginaire américain. La distorsion et la désinformation frisent évidemment la parodie, mais sont plus subtiles par leur procédé oblique, impressionnant (les nurses ensanglantées) ou atroce (les jokes). Fort heureusement mon critique, Monsieur Méduso, qui trouvait nulle ma revue des épouses de président, et se réjouissait de l'absence de commentaires, n'aura jamais songé à réfléchir sur l'Art de Prince. Si c'était le cas, il jetterait sans doute toute la production avec dédain. Voici son appréciation sur ces jokes :
Les thuriféraires habituels de Monseigneur Lussato n'ont même pas jugé bon de poster un commentaire sur un billet aussi insignifiant. Comme quoi, tous les espoirs sont encore permis.
Cela dit, on ne peut que comprendre ceux qui pensent que cet art est de la fumisterie. Une plaisanterie gribouillée sur un papier froissé, peut-elle se comparer avec les merveilles de subtilité, l'abnégation du peintre, la critique à laquelle est soumise chaque cm2.
Ceux qui ricanent, qu'ils aillent au Marmottan. Ils verront coexister des miniatures médiévales sans génie, mais d'une conception et une exécution miraculeuse de proportions, et une peinture lachée, dont les traits sont maladroits, le rendu approximatif, le paysage grossièrement représenté, comme à la va-vite. Rien de comparable avec Jérôme et Bouguereau, maîtres pompiers. Alors?
Alors on est nuls. Non parce qu'on admire ou on rejette de confiance une pièce qu'on ne comprend pas, mais parce qu'on ne fait pas l'effort de percer l'énigme. Et pour cela il ne faut pas compter sur les pédagogues, pour qui la beauté d'un Klein ou d'un Buren sont tellement évidentes qu'ils ne se demandent pas si on n'y voit pas des sufaces toutes bleues ou des stores de magasin, ni pour les passéistes comme Obalk qui crient à la supercherie.
Molière disait à ses critiques, qu'avant que de répondre à leurs objections, il faudrait leur apprendre des rudiments de l'art littéraire. On pourrait en dire autant pour l'art et la littérature, dont l'enseignement est singulièrement défaillant à l'école et supplantés par le noble art du ballon ovale et des chanteurs à micro.
Mais on touche alors à tout le problème des goûts et des couleurs. Les sémanticiens nous montrent que nul ne peut scientifiquement ni même avec un semblant d'objectivité prouver ses jugements. Il faut se résigner à dénombrer et classer les critères et leur adéquation à la vision de l'artiste, en tolérant toutes les déviations. Et ceci est également valable pour tout jugement.
Une section théorique importante de Virus traite précisément des "evaluation générator scales", les échelles génératrices de valeur. Je les avais nommées HUMELD (Hédoniques, Utilitaires, Morales, Esthétiques, Logiques et Développementales) mais mon ami Arnaud Mulliez avait sans doute été mieux inspiré de les remplacer par HUMBLE : Hédonisme, Utilité, Morale, Beauté; Logique, Evolution.
J'ai commencé à esquisser ces notions théoriques dans "psychologie de l'Art", mais je vais trop loin ou pas assez. J'ai envie de les reprendre dans des Masterclasses en Sémantique, mais quel travail! Cela introduirait une rupture de ton avec les autres billets, et bénéficierait de l'apport des membres de l'ISD, et des commentaires des blogs, comme cux de Meduso ou de Taille fine qui méritent plus que des railleries mais soulèvent par leur fureur, des questions qui les dépassent visiblement.