CHRONIQUE
Epreuves
Le billet que je viens de terminer (il est 2h18) est certainement le plus long que le blog ait enregistré. J'ai averti que ceux qu'hérisserait la longue énumération de livres à peintures que je destine à L.H. III qu'ils pourraient sans dommage sauter ce billet. Je ne regrette pas de l'avoir écrit et il me suffirait qu'une poignée de visiteurs l'apprécie pour trouver récompense et justification à cet effort considérable (il a fallu scanner et photographier des manuscrits, en affrontant un réseau qui ne marche que quelques heures par jour, d'une manière dont la logique m'échappe).
Je m'attends à quelques péripéties aujourd'hui et j'espère que je pourrai vous retrouver cette nuit. Que deviendrais-je sans mon blog? Bien fidèlement votre,
Bruno Lussato.
KLEE
Lectures récentes
Ainsi que je vous l'ai annoncé au cours d'un précédent billet, j'ai dévalisé le MAM. Ce qui m'interessait était moins des photos inédites que les textes qui accompagnait ces encombrants albums, souvent on trouvait en un seul livre de nombreux points de vue originaux. Ils éclairaient telle face cachée mais toujours suprêmement pensée, de Paul Klee. En voici des photos de couverture. Les commentaires suivront.
Le titre de cet ouvrage est décevant. Il laisse entendre qu'on a interwievé ou retrouve les textes de génies comme Einstein, Picasso ou Schoenberg sur Klee. Mais il n'y a rien de tel dans cet ouvrage. En revanche il évoque l'essentiel sur le peintre en un nombre lmité de pages par Roland Dosschka. Ce qui fait tout l'intérêt de ce livre, pour les connaisseurs de Klee est la découverte d'oeuvre rarement ou jamais publiées provenant principalement de la collection Rosengart à Lucerne et de collections privées allemandes. Attention : on ne parle du parcours du peintre que jusqu'en 1937.
Ce livre présente outre que des oeuvres de l'Ex fondation Paul Klee, à Berne (aujourd'hui le Centre Paul Klee) l'oeuvre architecturale de Renzo Piano en cours d'achèvement. Les très nombreuses photos du chantier intéresseront plus les architectes que les amateurs de peinture.
Cet ouvrage, édité à l'occasion d'une exposition Klee à Las Palmas (Canaries) n'apporte rien. On peut le rejeter sans hésitation.
Cet ouvrage édité par Actes Sud en Septembre 2008 est très intéressant pour qui est intéressé par les rapports - très significatifs - entre Klee, la mise en scène, et la musique. Cela permettra notamment de lire le texte magistral de Pierre Boulez, reproduit dans Klee - Le pays fertile , condensé en quelques pages et plus facile d'accès. Il est également passionnant de trouver des oeuvre dont certaines sont inédites, regroupées autout de ce thème. édité à l'occasion d'une exposition au Palais des Beaux Arts à Bruxelles.
Note : le réseau ne fonctionne que par intermittences et je suis obligé d'attendre qu'il veuille bien se rétablir. Passer d'Orange à SFR est une course d'obstacles contrairementà ce qu'on m'a dit.
Ce livre édité à l'occasion de l'exposition Klee à la National Gallerie de Berlin est très intelligemment divisé par thèmes d'influence de l'artiste : religion, <théatre, Musique, Peinture et architecture etc. A lui seul il suffit comme livre base sur le peintre. Le problème qui en interdit la lecture au plus grand nombre des français est qu'il est entièrement rédigé en anglais
Les Etats-Unis ont toujours joué un rôle important, grâce à l'intelligence de collectionneurs comme Katherine Dreyer et les Arensberg. Ce rôle est devenu fondamental lors de la chappe nazie et ce n'est pas le France très conservatrice qui eût pu accueillir le fugitif, ni le faire vivre par des commandes. Le peintre finit pas se retirer dans sa ville natale, et abandonner ses illusions sur le rôle de l'Allemagne dans le développement de son oeuvre. Il dut se rabattre sur les Etats-Unis où il fut accuelli par des transfuges comme lui, devenus marchands de Tableaux et des professionnels éclairés au premier rang desquels on placera Heinz Berggruen. Ce livre fort intérêssant pour les spécialistes détruit bien des idées reçues qui ont cours dans les milieux de l'intelligentsia parisienne.
On ne peut qu'être ahuris que de prendre connaissance des marionnettes de Klee, conçus à l'origine pour son fils Felix, mais devenus ensuite des oeuvres à part entière. Ces marionnettes sont fabriquées par les matériaux les plus pauvres, destinés à la poubelle. Les poupées de Klee montre avant l'Arte Povera, et à l'instar de Kurt Schwitters qui l'a précédé avec ses assemblages, que l'art transcende le matériau, et le transcende. Un bien beau livre, très original, et qui parle de lui-même. Il peut être montré à des enfants. Ce serait un beau cadeau d'anniversaire.
Il est 0h55 et je vais continuer ma nuit en lisant les livres de Klee. A ce propos j'ai reçu le coup de fil d'une charmante journaliste, qui est révulsée par les propos de Boulez, de Bergé... et de Klee lui-même. Socrate de son côté et son avocat, récusent ma démarche. Ce dernier ne voit pas le lien entre collectionner des monnaies, des livres anciens, des manuscrits à peinture et... si l'on ajoute le corpus de la première fondation, de l'art océanien, le japon populaire, etc. et entre ma personnalité profonde. C'est qu'il pense aux manifestations extérieures dont l'hétérogénéité dissimule -mais en même temps permet de révéler, les principes organiques qui les sous-tendent.
Socrate ne va pas aussi loin. Après avoir trouvé mon plan (donc l'expression des principes) trop peu intégré, il en trouve la nouvelle mouture trop compliquée. Peut-être a-t-il raison. Je vais par conséquent ne pas me laisse décourager et entamer avec lui un intéressant dialogue.
Il faudra qu'un jour je vous livre ce plan aménagé.
J'ai fait don à S*** dont vous avez été nombreux à apprécier le talent, notamment pictural, un accordéon japonais libellé Les voies de la qualité, Tokyo, 1er Juin 1987. Joël de Rosnay et moi, étions de retour d'une mission pour le compte d'Hermès. Il s'agissait d'inaugurer la valise carbone. Ce grand attaché-case était en fibre de carbone noirâtre, et rebaptisée : grain de caviar, ce qui était bien vu. Elle était renforcée de coins en fibre de carbone et doublée du plus beau cuir, qui exhalait son parfum dès qu'on ouvrait cet espèce de coffre-fort, inusable comme tout produit de Hermès. Nous descendîme à l'Hôtel Seibu, à Ginza, le plus luxueux de son genre. On vint me chercher dans une immense Bentler bordeaux, copie de celle de la famille royale britannique, on nous gratifia d'une secrétaire perticulière, les suites étaient décorée par l'épouse de M.Dumas-Hermès avec un soin et une élégance discrète. Devant mon lit était incorporé dans le mus un immense écran. On pouvait rêver devant deux images : l'une représentant un champ d'orge, l'autre les fonds sous-marins d'un lagon. Les caméra étaient rigoureusement immobiles.Les seuls mouvements prevenaient du vent qui inclinait les champs tels une chevelure blonde, avec fond bleu inaltérable, et vols de corbeaux traversants à la Van Gogh.
Malheureusement la conception de la valise, en dépit de sa qualité, était defectueuse. Si vous êtes astucieux, à la lecture de ma description vous aurez deviné pourquoi. Pour nepas vous faire languir, je vous explique tout de suite les incongruités qui dénaturent ce coûteux bagage.
Pourquoi de la fibre de carbone? Cetrte matière très dure, très résistante aux hautes températures est très légère. Pourquoi dès lors la renforcer avec de coins en ...fibre de carbone? Les coins servent à protéger une matière délicate comme le box ou le croco, par des dispositifs durs, en acier ou en bois. Ce n'est pas le cas ici.
Mais il y a pire. La raison d'être de la fibre, matière d'un aspect un peu ingrat, est la légèreté. Or la valise est entièrement doublée par un magnifique box en cuir naturel, pesant une tonne! Alors?
Alors, le fonctionnalisme a été sacrifié au symbole : l'alliance de la tradition et de l'artisanat du cuir, où excelle Hermès, et de la futurologie d'un matériau High-Tech.
Moins glorieusement, on a surfé sur le chic le plus superficiel, le clin d'oeil, la volonté d'avoir un produit d'exception (un peu comme le téléphone vertu). Le résultat fut un échec pour la maison, et l'occasion d'un voyage de rève pour De Rosnay (conseiller du parc de la Vilette et auteur d'un incunable du reductionnisme : "l'homme symbiotique". Au moment de Mai 68 cet aristocrate afficha comme bien des nobles, des idées égalitaristes d'autant plus généreuses qu'elles ne lui coûtaient rien.
Pedant le voyage de retour, ma tête était pleine d'exemples d'une qualité suprëme : splendeur discrète des grands magasins, aux patisseries mauves, roses, et vert jade: étage noble où les kimonos et écharpes se montraient dignes des plus beaux brocards brodés, surpassant les habits de la cour du Roi Soleil, et les somptueux "washis", ces papiers rares que les japonais ont porté au rang d'une porcelaine chinoise, et les jardins des temples à Nagoya et à Kyoto, et le lustre aux dix mille cristaux de Minami Tada, qu'on peut contempler à l'hoter Royal d'Osaka, et pour finir, ce succulent boeuf de Kobé, massé par des Geishas et gavé à la bière, plus cher que du caviar, plus rare que la meilleure des truffes... Et cette propreté, cette courtoisie, ce silence serein, cette attention protée aux détails... Tout cela m'habitait pendant le voyage dans le merveilleux avion de la JAL, aux cabines individuelles ornées d'un paravent et baignant dans la musique de Chopin. (Cela est du passé hélas, la qualité exceptionnelle a baissé moins qu'ailleurs certes, mais que de beaux rèeves évanouis).
Et dans l'avion, les couleurs du japon nous poursuivaient, comme la persistance de la mémoire rétinienne : ces verts jade, rose saumon, violet lavande et mauve du lilas d'été, ocre doux et orange mandarine,jaune-vert acide. J'avais emporté avec moi un petit makémono orangé, plié en accordéon,et quelques feutres de couleur, et je confectionnai pendant la traversé ce ce qui constitua la charte de mon centre des capucins.Il devait échoir à S*** en gage d'estime et d'affection.
Pendant que je traçais paisiblement mes signes colorés, Joël s'affairait sur son ordinateur. Voyez-vous, m'expliqua-t-il, je fais l'économie d'une comptable. Pour chaque conférence je soustrais de mes émoluments, les frais qui les grèvent : pourboires, dépenses vestimentaires, achats de souvenir, timbres-poste, taxis non pris en charge, etc... (Je cite de tête, et je ne jurerais pas de la lettre, mais l'esprit y était).. Voici donc la genèse du petit document que j'aimerai vous soumettre si un jour mon serveur le permettait.
Paris, 2h02.
Bonne nuit. Bruno Lussato.