CHRONIQUE
La neuvième porte
Je pense prendre congé de mes chers internautes pour cause, rassurez-vous, de congés. Enfin je pourrai, je veux l'espérer, pour la première fois depuis de dures années, prendre quelques jours de vacances sur la Manche, où j'ai un petit appartement, un logement de service, et un petit jardin avec une piscine, que je dois à mon fils. J'espère aller au marché, où il y a un étalage sympathiques de vieux livres, des gabardines burberry en solde, et évidemment d'excellents poissons. La mer n'est pas très belle : grise et infestée de goëlands qui envahissent la ville d'un concert ininterrompu de cris stridents qui empêchent les malades et les dépressifs de dormir.Mais il n'y a pas moyen de les faire décamper, car les écologistes l'interdisent. Ils préfèrent les oiseaux aux hommes, et peut-être ont-ils raison. Mais cela ne me convient pas car j'espérais enfin trouver un peu de repos la nuit.
Commentaires sur le film de Polanski, La Neuvième Porte.
Vous vous souvenez de mon marché de videodisques. J'ai commencé à en entendre un tous les soirs. Avant-hier un très beau film d'amour (Ville portuaire) hier, un autre film d'ingmar Bergman : l'attente des femmes, l'inverse du précédent, puis qu'on nie que l'amour véritable et durable puisse exister sans une bonne dose d'hypocrisie. Aujourd'hui, j'ai revu "La neuvième porte" de Roman Polanski - que le hasard avait dévié sur New York , raconte Jerzy Kosinski, son grand ami, pendant que la secte démoniaque à Manson, perpétrait son carnage dans sa demeure de L.A.
Le livre sur lequel est basé le scénario est de Arturo Pérez-Reverte, Le Club Dumas, best-seller de l'auteur qui avait déjà signé Le tableau du maître flamand. Deux réussites exceptionnelles.
La première fois que j'ai vu La Nouvelle Porte, je l'ai considérée comme un thriller réussi. En le revoyant ce soir avec ma muse Sandrine, j'ai compris que c'était un grand film, qui mérite de prendre sa place parmi les meilleurs.
La première partie tourne autour d’un livre d’occultisme mystérieux, dont il n’existe que trois exemplaires dans le monde. Il s’agit de comparer les exemplaires car seul l’authentique permettra d’atteindre la neuvième porte, celle qui donne accès aux pouvoirs démoniaques.
Dans le film,le livre est tout à fait crédible : l’impression est de toute beauté, les bois qui l’accompagnent ressemblent à des figures de tarots et offrent des rébus difficiles à décoder.
Ci-dessous, le frontispice et le premier bois de l'exemplaire du Livre de Pérez-Reverte fidèlement repris par Polanski.
Comparez-le avec le frontispice d'un livre de l'époque.
Comparez le style des bois du livre de Perez-Reverte, avec la première édition de la Divine Comédie illustrée de gravures sur bois, en 1487
Notez aussi la parenté avec des lames de tarot. Ici, documents annexes de L'Entretien.
Le propriétaire d’un des exemplaires veut s’assurer que le sien est bien authentique en le confrontant aux deux autres.
La beauté formelle du film est saisissante, les couleurs, le cadrage, la poésie, tout cela est d’une haute qualité. Cela n’est pas sans rappeler Meurtre dans un jardin anglais de Peter Greenaway, qui figure dans notre marché des DVD illustres.
La deuxième partie du film est d’un style très différent. On reconnaît immédiatement le style, la musique, le décor, d’Eyes Wide Shut de Kubrick, que j’ai mis dans ma liste de chefs d’œuvre exigeant d’être vus plusieurs fois pour livrer leurs secrets.
Il ne me semble pas possible de croire que Kubrick pour son dernier film ne se soit consciemment Inspiré par Polanski. Certes le Kubrick est plus subtil, plus grandiose, plus raffiné, mais il ne présente pas une image aussi saisissante que les dernières de La Dernière Porte.
Il faut cependant reconnaître que la qualité di livre de Perez-Reverte, y est pour beaucoup. Il offre en route, plus encore que le film , une illustration convaiquante de l'impact mystérieux qui, pour certains, fascine, voire perturbe certains esprits réceptifs à l'aura dégagée par les livres rares et fortement chargés de sens. Le livre, offre des reproductions des trois livres magiques, qui ressemblent à ceux que l'on trouve chez les antiquaires d'incunables décrits parfaitement par Perez-Reverte.Les images, elles, ressemblent aussi à des lames de tarots.Je reproduirai en sollicitant la bienveillance des ayants-droits, la page de frontispice, etla première gravure à des fins de comparaison qui traduisent l'admiration que je peorte à auteur et à réalisateur.
Si vous croyez que ces histoires de sorcellerie, de livres dotés de pouvoirs occulte ou en livrant les secrets s qui mènent à l'obtention de ces pouvoirs, sont de la pure fiction, détrompez vous. En Amérique pullulent les sectes et les « livres magiques » comme ce Livre des Noms morts, le Necronomicon, dont il en existe plusieurs versions, l’une proche de Lovecraft, l'autre écrite par John Dee le cryptographe de la Reine Elisabeth.
Ci-dessous vous trouverez l’unique manuscrit de Nostradamus, daté de 1561 appartenant à la bibliothèque d'un "humaniste" épris d'occultisme qui figurerait fort bien dans le film de Polanski. Il possède également des éditions anciennes d'Agrippa le magicien, cité dans l'Ange de Feu de Prokofiev.
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Ci-dessous, un exemplaire de tête d'un des livres magiques édités voici quelques décénnies à New-York. Les circonstances de son obtention ont été étranges, rappelant le film de Polanski. Tous ces livres revendiquent l'authenticité du texte du Necronomicon. La reliure est en cuir et palladium et vous noterez la ressemblance avec celle qui orne les livres magiques du film.
Bien entendu, une autre référence s'impose, le Da Vinci Code de Dan Brown. Le copyright date de 1964, mais sa mouture luxueusement illustrée a été éditée en 2003/2004. Ses illustrations montrent clairement les similitudes avec l'imagerie de Polanski et, bien entendu d'Arturo PEREZ REVERTE (Le Club Dumas) en dépit d'un mauvais goût typiquement américain. Quant au film tourné à grands frais, il a été un beau fiasco. Cela ne vaut pas la peine de se le procurer sur DVD.
Cette chapelle sinistre rappelle les châteaux du film de Polanski
Une partie d'un manuscrit secret.
Le frontispice de l'édition de luxe qui est également la première édition illustrée.
Ci-dessus un canular extrait de L'Entretien.
A titre anecdotique je termine ce billet par un fragment d'un des livres annexes de L'Entretien, allusion directe à Dürer, mais aussi à Léonard et aux livres de magie.
Note du 2 mai 16h45. Dernière minute.
En explorant ma bibliothèque, j'ai trouvé un petit in-8vo noir qui fait partie des annexes préparatoires à L'Entretien. Il m'a semblé fort bien s'inscrire dans ces commentaires sur la Neuvième Porte.
Comme vous pouvez le constater, la couverture ressemble tout à fait au grimoire qui constitue le centre de l'intrigue dans le film.
Le frontispice représente les sceaux et une paire d'yeux au laser. Lorsque vous bougez ils vous suivent et changent d'aspect.
Une double page de l'introduction, montrant les lettrines et l'écriture de chancellerie tracée à la feuille d'argent et au crayon argent. finement taillé.
Une double page montrant deux des quatre états des substances magiques.
Où la quatrième porte est annoncée. La pieuvre stylisée représente une des formes de la captation, ou fascination hypnotique qui asservit ses victimes.
A gauche l'araignée, qui piège un moucheron, symbole de la quatrième porte, celle du réseau ténu d'intrigues qui désoriente l'assujetti. A droite, la cinquième porte.
L'entrée de la neuvième porte (au delà de la huitième porte). Mais ce qu'on y découvre n'est pas quelque lumière infernale ni quelque apparition effrayante, mais - ce qui revient peut-être au même - le monde. Cela se passe de commentaires.
Le colophon du livre m'apprend qu'il a été commencé au mois d'Août 1982 à Lebach (Sarre) dans la maison de mes beaux-parents, et terminé le 24 Novembre à minuit, soit à 0h le 25 Novembre, anniversaire de mes cinquante ans. Je n'ai donc pas pu connaître le livre de Reverte, Le Club Dumas qui date de 1993, et encore moins le film de Polanski. La démarche était d'ailleurs tout à fait différente car je suis parti du Necronomicon, et dans lequel les chercheurs ont raconté comment après des semaines de recherches infructueuses avec l'Illiac, le plus puissant des ordinateurs de l'époque, ils on par inadverdance compris le code. Ces péripéties sont tout à fait dans le style du livre de Reverte, mis en film par Polanski.
Bonne nuit et relisez les autres billets, ils ont tous été réactualisés, corrigés et complétés.
Votre Bruno Lussato qui vous laisse en compagnie avec son successeur S***