Du lointain
Vint me voir en cette fin de soirée le père Oleg Borodine. Il m'était recommandé par le père Slotine, patriarche de l'Isola Quadrata; associée au couvent des arméniens de San Lazzaro, au large de Venise. Cet homme ascétique arborait une barbe très noire et des yeux passionnés qui regardaient en dedans, comme les prophètes. Il m'expliqua sa vision eschatologique du monde et nous fumes tous deux surpris par l'identité de nos conclusions. Mon langage m'étant plus familier, je l'adopterai pour synthétiser notre conversation en fond de constat.
A la fin du siècle ignoble dont parle Conquest, enfanté par la Révolution Française, le monde perdit définitivement le sens de ses valeurs. Le livre du bien et du mal s'enroula dans le ciel et disparut. Il resta le néant axiologique dont se flattent les élites.
Quatre continents sémantiques se partagèrent l'esprit et la terre.
Les deux premiers, OUEST et EST se livrent aujourd'hui un combat à mort pour la domination matérielle du monde. Le leader : l'Amérique, le challenger, l'Asie, divisée entre elle, unie contre l'occident. La conquête de la technologie est un atout encore favorable à OUEST, mais la lèpre économique ronge tout, sape les fondations et détruit les emplois. Elle est mise en oeuvre par EST avec ses millions de zombies nourris au riz et fanatisés contre les barbares occidentaux, qu'on attire par des sourires et l'appat du gain. Car GREED est le mot d'ordre universel, le moteur qui anime les riches financiers de l'OUEST. Le reste n'est qu'hypocrisie.
EST et OUEST ont appris que le développement technologique, seul à assurer l'emploi de l'OUEST, et le développement industriel, nécessaire à la survie des zombies nourris au blé, sont tributaires de l'Energie et de l'Eau. L'Amérique a compris cela depuis le début et fonde sa stratégie immuable sur les postulats suivants :
1. Moins il y a de convives autour d'une table, plus il y a à manger.
Si l'on élimine l'Europe, et qu'on la coupe de ses ressources énergétiques, c'est autant de gagné. Un développement concurrenciel en moins.
2. Les européens, ont les aime... Mais comme ancêtres, pas comme concurrents.
3. De toute façon on ne doit rien à ces salauds qui manipulés par les communistes; nous crachaient à la face : US Go Home! Ils ont passé par profits et pertes les gars qui sont venus de notre pays pour se faire massacrer pour eux.
4. Lorsque l'Europe va mal les Etats-Unis vont bien. Il se produit un afflux de cerveaux et de riches, qui viennent féconder les élites de notre pays. Pendant ce temps, ils importent des congolais et des tchadiens ! La politique Européenne est du pain béni pour nous. Et c'est la France qui prend la tête du mouvement panurgique. Il n'y a que des énarques et des arrogants pour suicider leurs compatriotes en toute légitimité.
5. Mais voilà, il ya le pétrole irakien et le gaz russe. Jadis la France avait de bonnes relations avec Saddam Hussein et Bouyges en profitait. Cela aurait débouché sur des approvisionnements dangereux pour nous. Grâce à Bush l'Irak est devenu un mess. On nous accuse, alors qu'on s'en fout. En attendant bas les pattes pour les européens sur le pétrole et les investissements en Irak.
6. Et l'energie russe? Pour couper des russes les européens trois moyens : a- Le canal Nord : se servir du cheval de Troie polonais dont les flancs antirusses, sont aux ordres de l'Amérique. b - Le Caanal SUD : Mettre la pagaille en Bosnie et en Croatie et démoniser les Serbes alliés des chrétiens orthodoxes russes. c - Le coup de grâce. D'ici une décennie, la Russie deviendra l'acteur incontournable de développement pour les européens. Un courant suicidaire, idéologique et moralisateur, s'ingénie à nous monter contre Poutine et la Russie. Y participent les bureaucrates et les élites politiques de l'UE. Mais c'est la France qui est en tête et entraîne les autres. (Alors que les Allemands, les Italiens, les Espagnols, les Autrichiens, ont malheureusement compris ce qu'un enfant de quinze ans découvrirait tout seul.) Heureusement la France fait un excellent travail et on l'aide comme on peut. C'est si facile !
Eurabia,
le continent du déclin.
La France est certainement le dernier pays soviétique, le dernier à maintenir le mensonge de la liberté, de l'égalité et de la fraternité. On sait ce que cela vaut : pesantes contraintes bureaucratiques, légales et règne de l'arbitraire, prolifération des privilèges légalement concédés, et luttes fractricides. Mais on n'en parle pas, ça ne s'écrit pas, cela est occulté dans les discours officiels. Cette dérive soviétique va plus loin car elle vise sciemmment la destruction méthodique de notre civilisation, des nos racines, de nos sources, de notre mémoire, de notre langue.
Les religions chretiennes et juives, les traditions et l'humanisme gréco-romain, sont interdits d'expression achevant le désarroi des populations. Les musulmans qui eux, ont une religion bien établie, la défendent et gagnent du terrain, transformant l'Europe en une Eurabia.
L'Europe n'existe pas. Se frontières sont poreuses à force de s'étendre, et sont de véritables passoires. Jamais aucune politique commune n'a été envisagée en matière de contrôle aux frontières, vite taxé de raciste par les mouvements vertueux. La terreur intellectuelle empêche que l'on pose dans ce pays, les questions les plus simples relatives à l'entrée en Europe et aux droits de douane.
Nous espérions que Nicolas Sarkozy redresserait la barre. Mais il s'est révéle en fait comme la dernière cartouche d'un système moribond. Ce système croit à la valeur du mot, de la déclaration publique, du marketing politique, et le Président est un génie en la matière. Mais après, il faut assurer; il faut faire passer dans l'opérationnalité et dans les faits. Mais sommes nous bien sûrs qu'au delà des effets d'image, nos ministres aient tous la trempe et la compétence pour faire passer dans les faits la volonté du Président? Le temps manque et l'asphyxie guette. Le mot ne peut remplacer la chose, n'importe quel entrepreneur lillois vous l'apprendra. En dépit de ces dangers, et à cause d'eux, il faut défendre Sarkozy. C'est un problème de patriotisme, d'éthique politique. C'est le seul qui puisse sauver un occident moribond de la disparition sémantique.
Les plaques techtoniques.
Ces continents sémantiques, à l'exception de l'Occident, obéissent à la loi du plus fort, ou à des idéologies et des religions opposées à l'Occident. Ils sont en lutte ouverte avec la civilisation occidentale, et les occidentaux feignent de ne pas s'en apercevoir, afin de ne pas être acculés à les blamer, ce qui serait politiquement incorrect.
Ces continents subissent une dérive qui les éloigne les uns des autres, créant des tensions aux points de jonction; Londres et Dublin, Moscou et Saint Pertersbourg. Mais l'évolution rapide du monde, l'incapacité des américains à gérer les affaires internationales, la découverte des nouveaux gisements polaires; a fait passer Londres et Moscou au Statut supérieur ; celui d'acteur à temps
plein.
LONDRES. La capitale financière mondiale a dépassé New York. C'est le centre où l'argent se concentre, circule, se métamorphose, devient pouvoir.
MOSCOU. La Russie a profondément muté. Contrairement à la France, ils ont fait leur cuti, ils ont vomi les système communiste; comme les allemands, l'idéologie Nazie. Ils n'y reviendront pas. En revanche, ils ont besoin de technologie, de reconnaissance, de développement, et .... de respect. La France en un acte de folie a décidé que l'histoire de France commencerait l'AN 1 de la révolution. L'égalité donna alors naissance aux passe-droits et aux privilèges, la fraternité, aux luttes fractricides, la liberté à une chape de plombb étouffante, de réglementations incompréhensibles, dissimulant l'arbitraire le plus décourageant.
La Russie se souvient de son passé. Elle découvre ses racines orthodoxes, les mêmes que les notres, elle les défend contre l'envahissement de civilisations étrangères, musulmanes ou chinoises. Elle renoue avec une culture qui fut des plus grandes et dont elle sent la grandeur en comparaison des l'ordure de masse culturelle américaine. Il faut l'aider, lui apporter aide et coopération, et desserer un mur de méfiance, que nous avons nous autres élites intellectuelles contribuer à édifier.
Si vous avez quelque crédit auprès de l'homme sage qui aide le Président, ajouta le père Slotine, essayer de lui porter mon message : tout faire pour faire passer dans l'opérationnalité les discours, renouer autrement qu'à doses homéopathiques avec la nation qui nous est si proche et dont nous dépendrons, et que nous avons tant éloignée de nous, constituer un pôle de l'énergie entre les quatre grands Etats Européens en y associant les Russes.
Le père Borodine ayant parlé, nous avons abordé un thème apocalyptique, la question du combat entre le bien et le mal, et la négation de ce combat. En me quittant, il m'embrassa et me demanda de le bénir, ce qui ne me laissa pas de me géner, mais après tout, le contexte s'y prétait. Il me laissa un nom, celui de son projet : FONDATION POUR LA SURVIE. Je l'achetai aussitôt.
Après son départ je m'aperçus qu'il avait oublié son agenda. Je ne pus le rappeler, pour le lui restituer, car je ne savais rien de lui. Existait-il seulement?