*** Nous attaquons ici l'analyse du développement de la sonate en la mineur K310.
Nous citons Füssl et Scholtz (Urtext) :
" Ainsi que les notations dans le reste du 1er mouvement, il est remarquable de signaler que la relativement longue section piano de l'exposition et de la réexposition, s'oppose à un bloc fortissimo dans le développement qui commence dans la dominante secondaire de si majeur qui tombe sur un pianissimo après quatre mesures (à nouveau sans le moindre changement structurel et pianistique!), pour conclure fortissimo quatre mesures après dans un total de 18 mesures qui inclut le commencement de la rexposition. Ce mouvement avec ses contrastes dynamiques violents (il est très rare que Mozart écrive pp ou ff) tout en préservant l'unité thématique et architecturale la plus grande possible, semble avoir été conçu orchestralement plutôt que pianistiquement"
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Ci dessus on a reproduit le passage pp et une partie de la suite ff.
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Ci dessus nous reproduisons la fin de la réexposition, à partir du moment où les pianistes amorcent leur crescendo, alors que rien de tel n'est indiqué dans la partition. Les trois sections de ce passage appellent des accents énergiques : les deux premières mesures sont péremptoires, à la 5ème mesure un déferlement descendant et furieux en septième diminuée, brisé par un nouvel accord de septième au registre aigu, conduit à la conclusion dactylique implacable. Comment imaginer un tel paroxysme dans une nuance piano? Nul n'y parvient, et nous mêmes, en dépit de notre bonne volonté, avons du mal à l'interpréter conformément à l'original.
Une remarque doit être formulée à propos de la réexposition en la mineur du second thème, en do majeur de l'exposition. On a vu dans la première partie de cette analyse, que le procédé est tout à fait courant dans les "perles noires", c'est à dire les oeuvres en mode mineur, celui de la douleur, de l'angoisse et sentiments intimes ou des situations dramatiques. Mozart remplace la séquence : [1er th. tonique - 2eme th. dominante] ►[développement modulant vers la réexposition] ► [1er th. tonique-2ème th. tonique] , par la séquence [1er th. tonique en mineur - 2ème th. relative majeure] ►[developpement modulant] ► [1er th. tonique en mineur - 2ème th. tonique en mineur]. L'interprétation formelle, est le retour à l'équilibre et la suppression de la tension entre le premier et le second thème. Mais ce n'est pas si simple, si l'on compte les résonances psychologiques profondes entraînées par le mode mineur (exceptionnel dans les sonates pour piano : deux en tout, dans les tonalités dramatiques de la et de do mineur. Alors que le public attend le retour du deuxième thème en majeur, c'est en mineur qu'il apparaît. Alors que la gaîté venait contrebalancer l'angoisse, dans l'exposition, c'est celle-ci qui domine dans la récapitulation. Aucune lueur d'espoir, le thème joyeux en do majeur, n'est pas seulement assombri par sa modulation en mineur, mais aussi par une transformation thématique qui lui imprime un caractère chromatique sinistre. On rencontre de procédé dramatique dans d'autres oeuvres, comme la sonate en do mineur déjà citée, et la célèbre 40ème symphonie en sol mineur.